LES BANNIERES DE PERSH - ALAIN PARIS & JEAN-PIERRE FONTANA

Jack la poudre est un prospecteur qui parcoure l’espace en tous sens dans l’espoir de découvrir un bon filon. Au cours de l'un de ses voyages, une avarie à bord de son vaisseau l'oblige à se poser sur une planète inconnue. Capturé par des insectes humanoïdes, il est emmené en captivité avec d’autres humains.

C'est un bien chouette petit roman que le duo Fontana/Paris nous a pondu là. Cour, vif et pétulant, il oscille entre Science-Fiction et fantasy. La SF pour le cadre général, l'entrée en matière et la conclusion, la fantasy pour le corps du récit avec ses combats à l'arme blanche ou l'aspect "médiéval" de la société pershéenne.

Tout va très vite et sans le moindre temps mort. L’action est menée tambour battant. Les batailles succèdent aux duels et les retournements de situation s'enchaînent. Çà ne laisse pas beaucoup de temps pour s’intéresser au caractère de personnages qui, héros excepté, ne se posent d'ailleurs pas beaucoup de questions. Alors on fait comme eux. On se contente de se laisser porter par ce récit simple, fluide et plaisant.


Notons tout de même que l’épilogue est relativement surprenant et confère au livre ce petit plus qui en fait une lecture très recommandable.


Fleuve Noir Anticipation - 1984

LE MONDE VERT - BRIAN ALDISS

Quelques millions d’années dans le futur, la Terre est une planète proche de sa fin, qui a cessé ses révolutions autour du soleil et présente toujours le même hémisphère à cet astre. Conséquence de cette situation, la flore s’est mise à se développer de façon anarchique et incontrôlée jusqu’à devenir l’espèce dominante de la planète. Les rares humains ayant survécus ont régressé à un stade tribal et mènent une vie précaire dans les bas étages de la sylve monstrueuse.

 J’ai éprouvé beaucoup de difficultés à m’intéresser aux mésaventures de ces pauvres humains bien démunis face à un environnement plus que périlleux. Et périlleux est un euphémisme. Il en meure tant dès les premières pages du livre qu’on a peine à croire que d’aucuns survivront assez longtemps pour permettre à l’auteur de finir son récit. Et cette hécatombe rend vaine toute tentative de s’attacher à l’un ou l’autre des personnages, tant leurs désirs, leurs envies semblent illusoires et voués à l’échec.


L’intrigue se résume bientôt à une longue fuite en avant, ponctuées de rencontres souvent désagréables, parfois drôles, mais toujours dangereuses. D’ailleurs, le véritable intérêt du roman réside dans la description des quelques peuplades rencontrées par les héros et surtout dans l’infini variété de forme et d’aspect empruntée par la végétation. Ces descriptions sont l’occasion pour l’auteur de lâcher la bride à son imagination et d’inventer les plantes les plus folles qui soient ainsi que leurs noms bien jolis et forts évocateurs.


Le tout m’aura tout de même paru bien longuet, peu intéressant et ne me laissera pas un souvenir impérissable.


J'ai Lu - Science-Fiction - 1974

L'ECLAT D'OBUS - MAURICE LEBLANC

1914. Tout juste mariés, Paul Delroze et son épouse emménagent dans le château d'Ornequin, à quelques kilomètres de la frontière allemande. En visitant la vieille bâtisse, Paul découvre le portrait de la défunte mère de sa femme en laquelle il reconnaît la meurtrière de son père, quinze ans plus tôt. Le déclenchement de la guerre suivie de l'invasion allemande l'empêche de faire la lumière sur ce mystère. Du moins provisoirement...

Maurice Leblanc a écrit "L'éclat d'obus" en 1916, alors que la première guerre mondiale faisait rage et que le nord de la France était ravagé par de sanglantes et destructrices batailles. Il n'est donc pas surprenant d'y trouver moult envolées patriotiques exaltant le courage et l'esprit de sacrifice des soldats français et de non moins éloquentes critiques de la barbarie teutonne.


Pour le reste, nous avons affaire à une histoire d'espionnage bien dans le goût de l'époque. Tunnels, passages secrets, caves, portes dérobées, toutes les ficelles des romans du genre ont été conviées. Les personnages font ce que l'on attend d'eux. Le fougueux héros prend les risques les plus insensés pour délivrer sa belle et faire obstacle à la piétaille tudesque, son épouse fait preuve d'une résilience digne de Pénélope et leur ennemie jurée, dont l'identité véritable constitue le principal mystère de ce roman, n'aura de cesse de provoquer leur perte. Ces épisodes romanesques sont bien évidemment entrecoupés de nombreuses scènes de combats qui n'ont malheureusement pas le réalisme et l'âpreté de celles écrites par un Barbusse ou un Dorgelès.


On signalera enfin la présence aussi éphémère qu'anecdotique du célèbre gentleman cambrioleur venu refiler quelques tuyaux au héros de l'histoire. Une apparition en Guest star sans doute motivée par de basses raisons commerciales...


Le Livre de Poche




L'ERREUR D'ALEXIS ALEXEIEV - A. POLEISCHUK

Alexeï Alexeïev vient à peine d'annoncer à l'un de ses amis une découverte qui selon lui va révolutionner le domaine de la physique, que son laboratoire est l'objet d'une inexplicable explosion. Le chercheur et toute son équipe se retrouvent prisonniers d'une masse translucide et incassable, à l'instar d'un bloc de glace. A peu de temps de là, un mirage céleste apparaît à heure fixe en divers points de la planète. Les scientifiques chargés de faire la lumière sur les causes du sinistre vont très vite soupçonner un lien de causalité entre les deux évènements. Mais leurs hypothèses les plus folles seront encore en-deçà de la réalité.

Ce roman est un curieux exemple "d'enquête scientifique". J'entends par là une enquête menée par des chercheurs (physiciens, météorologues, astronomes...) qui unissent leurs efforts pour déterminer la nature d'un curieux phénomène stellaire ainsi que le contenu des recherches auxquelles se livrait l'un des leurs. Par le biais d'observations, d'expérimentations, en interrogeant divers témoins ou en consultant notes et correspondance d'Alexeïev, ils essayent de remonter le fil de ses expériences et d'en appréhender toutes les conséquences. A première vue, cela peut paraître un peu aride et j'avoue m'être senti un peu perdu au milieu des champs gravitationnels et autres rayonnements électromagnétique. Mais, grâce à beaucoup de vulgarisation et quelques scènes plus légères, l'auteur parvient à rendre accessibles les discussions de toutes ces grosses têtes. Qui plus est, il réussit à maintenir le suspense jusqu'à une chute qui doit beaucoup à Einstein et sa théorie de la relativité.

J'ai également été amusé de voir évoluer les personnages dans cette URSS qui n'existe plus, mais où il faisait apparemment bon vivre. Les paysans y sont heureux, le directeur du kolkhoze local est incroyablement serviable et même les rapports avec les affreux impérialistes américains sont on ne peut plus cordiaux. Mais Poleischuk pouvait -il écrire le contraire en 1963 ? Rien de moins sûr et les réflexions du professeur Topanov, très « soviétiquement correctes », en sont la preuve : "Ce que je crois, camarade, ce que je crois, ami, c'est que l'avenir de l'homme n'a pas plus de limites que le cosmos lui-même. Je crois que tout est Vie, que tout est résurrection. Voilà la vraie découverte d'Alexeï et en quoi résidera son authentique gloire. Grâce à lui, désormais, tout espoir raisonné peut-être certitude." Voilà qui témoigne d'une confiance absolue en l'être humain. Le triomphe de la raison sur la croyance, de la science sur l'obscurantisme. Tchernobyl n'était pas encore passé par là !

Gallimard - Le Rayon Fantastique - 1963

LE CANTIQUE DE L'APOCALYPSE JOYEUSE - ARTO PAASILINNA

Pour respecter les dernières volontés de son grand-père, Eemeli Toropainen entreprend l’édification d’une église dans le grand nord finlandais. Une fois le bâtiment construit, il décide de s’installer à proximité, bientôt rejoint par des écolos en rupture de ban, des ouvriers au chômage et quelques autres hurluberlus. Une petite communauté à tôt fait de se constituer puis de prospérer et se révélera finalement mieux armée que bien des états quand il s’agira d’affronter les périls du nouveau millénaire.

 On pourrait classer la plupart des romans d’Arto Paasilinna dans deux genres littéraires :

- les « road books » qui mettent en scène les tribulations chaotiques d’un ou plusieurs personnages à travers la Finlande et l’Europe : « Le lièvre de Vatanen », « La cavale du géomètre », « Petits suicides entre amis »…

- les « robinsonnades » décrivant l’existence d’une communauté en marge de la société : « Prisonniers du paradis », « La forêt des renards pendus », « le potager des malfaiteurs ayant échappés à la pendaison »...


Dans les deux cas il s’agit pour l’auteur de mettre en scène des personnages au caractère entier, anticonformistes, individualistes et refusant le carcan que leur impose la société. Le présent roman ne fait pas exception à la règle. Nous y trouvons des personnages truculents, bien décidés à conserver leur mode de vie et leur joie de vivre malgré les soucis que leur cause l’état finlandais, les institutions européennes et les évènements dramatiques de cette fin de XXème siècle. L’auteur y décline tous les thèmes qui lui sont chers : un certain retour à la nature, mère nourricière et source de toute vie, le bon sens paysan opposé à l’absurdité des règles administratives et bien sûr la liberté. Liberté d’entreprendre, liberté d’aimer, de croire, de boire…


A première vue, tout cela n’a que peu de choses à voir avec la Science-Fiction. Et pourtant je n’hésite pas à classer ce roman dans le courant post-apocalyptique. Pourquoi ? Parce que la plupart des sujets inhérents à ce courant de la SF y sont présents, que ce soit dans les causes de la catastrophe (crise économique globale, incident nucléaire, 3ème guerre mondiale) que dans ses conséquences (effondrements des gouvernements, repli communautaire, lutte pour la survie…).


Bien sûr, l’apocalypse selon Paasilinna est une apocalypse joyeuse (c’est écrit dans le titre), pleine de finlandais rougeauds et hilares, adeptes de sauna et de bonne chère, et l’amateur de SF classique n’y trouvera sans doute pas son compte. Peut-être reprochera-t-il aussi à ce roman son manque d’intensité dramatique ou bien l’absence d’une réelle intrigue. Mais tout cela n’est pas bien grave tant l’humour et la bonne humeur de Paasilinna sont communicatifs. Une lecture à conseiller donc, pour chasser la morosité et découvrir que post apo ne rime pas forcément avec désolation, désespoir et violence.


Denoël - Et d'ailleurs - 2008

GARBAGE RAMPAGE - JULIAN C. HELLBROOKE

Dans le quartier du Bronx, de nombreux cadavres sont retrouvés à moitié dévorés. Bêtes sauvages, anthropophages, les rumeurs vont bon train d'autant qu'on signale également la disparition de plusieurs femmes dans le même secteur. La détective Farley, jeune afro-amérocaine ambitieuse, est chargée de l'affaire...

"Garbage Rampage " est un hommage non dissimulé à la célèbre trilogie des rats de James Herbert. Comme son illustre prédécesseur, Julian C. Hellbrooke met en scène des rats plus gros et plus intelligents que la moyenne qui s'attaquent aux humains. On se rend toutefois très vite compte que plus de quarante ans séparent les deux romans. Si celui du britannique peut encore faire frémir, celui de Julian justifie largement sa présence dans la collection trash.  Il faut dire que ses rats sont particulièrement coriaces puisqu'à moitié humains et qu'ils ne se contentent pas de bouffer leurs presque congénères. Ils kidnappent également des jeunes femmes afin de les engrosser et créer ainsi une race de mutants.

Tout cela donne lieu à des scènes finalement plus écoeurantes que véritablement effrayantes et le fait que l'essentiel du récit se déroule dans les endroits les plus dégueus de la Grosse Pomme (égouts, caves, souterrains...) ajoute encore à cette ambiance sale et visqueuse.

Côté intrigue, l'auteur n'a pas fait de gros efforts pour expliquer le pourquoi et le comment de ces rats transgéniques. Il se contente d'évoquer pêle-mêle des recherches militaires interdites et les magouilles de l'industrie agro-alimentaire sans chercher à approfondir son sujet. Même légèreté côté personnages en dépit d'un duo de flics - la bombasse métissée et le macho raciste - plutôt explosif.

Trask 2014


ACHETEZ DIEU ! - CHRISTOPHER STORK

Don Love, jeune illuminé doté d’un charisme hors normes, est exploité par un publicitaire sans scrupules. Un richissime homme d’affaires voyant en eux le moyen d’accroître sa fortune et sa puissance, décide de s’attacher leurs services. Il tentera, avec l’aide d’un spécialiste du comportement et grâce à la télévision, de soumettre hommes et femmes au pouvoir d’une nouvelle secte.

Petit roman sans prétention sur les thèmes des manipulations mentales et du risque sectaire. Le rythme est enlevé, le déroulement de l’intrigue bien maîtrisé et les personnages plaisants bien qu’un peu caricaturaux (je pense en particulier au directeur de journal).


Bien sûr, on a un peu de mal à croire que quelques messages subliminaux et des séances d’hypnose soient suffisants pour infléchir la volonté de dizaines de milliers d’individus, mais la démonstration demeure sympathique.


A lire donc, ne serait-ce que pour se convaincre, s’il en était besoin, que religion et télévision sont bien les opiums du peuple.


Fleuve Noir Anticipation - 1979

UNE VIE DE SAINT - CHRISTOPHE SIEBERT

Mertvecgorod, séquence 7. Aussi pugnace et précis qu’une araignée tissant sa toile, le bonhomme Siébert poursuit ce qui s’apparente de plus en plus à une immense fresque avec ce volume qui, après des romans plus intimistes (Valentina, Vive le feu) renoue avec une manière de faire plus transverse. Sur près de 500 pages réunissant des textes aussi divers qu’une biographie officieuse, un roman, une confession, il retrace l’histoire de Nikolaï le Svatoj, laquelle se confond avec celle de la triste république de Mertvecgorod, la RIM pour les intimes.


Des années soixante-dix jusqu’à nos jours et même un peu plus loin, nous suivons donc l’ascension et la chute d’un personnage ambigu, gourou, apparatchik, « Messie des crevards », terroriste. Nous le suivons dans sa quête de pureté alors qu’il célèbre la « Belle Dame » dans une URSS sur le déclin. Nous le voyons se brûler les ailes aux flammes de la réussite sociale et de l’argent facile. Nous l’accompagnons dans sa quête de rachat au service des exclus et entrevoyons les raisons qui le pousseront à perpétrer l’attentat le plus meurtrier de l’histoire de la petite république. Une vie racontée de bien des façons et par bien des personnages, les différents points de vue et les différents supports éclairant tous les aspects d’une personnalité complexe qui hésite sans cesse entre volupté et mysticisme.


A propos de mysticisme justement, j’ai beaucoup aimé cette façon de nous montrer les dernières années de l’URSS et l’avènement des oligarques et autres mafieux sous un angle ésotérique qui m’a rappelé ce que Viktor Pelevine avait fait pour les années Eltsine avec « Les nombres ». Mais si le russe avait opté pour les arcanes de la numérologie, Christophe a préféré un fantastique à l’ancienne en convoquant à la fois les Grands Anciens de Lovecraft et le Golem de la tradition yiddish. L’exercice est intéressant. Il apporte au récit une dimension encore plus sombre et inquiétante tout en constituant une fort jolie allégorie sur la part d’ombre qui entoure richesse et pouvoir. Car oui, l’argent corrompt tout et tous. Pas seulement les plus avides ou les plus pourris, les politiques prêts à tout pour rester aux commandes ou les malfrats qui cherchent à étendre leur empire. Il gangrène aussi les purs, les idéalistes, les révolutionnaires, les croyants de toute obédience, tous, même ceux qui ont connu la dèche et la crasse, même les plus démunis, même les saints.


S’il nous montre jusqu’à la nausée les frasques les plus immondes des gagnants du système, Christophe Siebert n’oublie pas les perdants. Une foule de personnages secondaires traversent son récit et viennent témoigner de leurs conditions de vie atrocement dégradées. Il nous fait ainsi mesurer à quel point est insupportable ce gouffre qui sépare cette majorité misérable et silencieuse de la caste des privilégiés. Car si l’extrême richesse n’avait d’autre réalité que son obscène démesure et son gâchis insensé de ressources et de biens, l’on pourrait peut-être encore s’en accommoder. Hélas, elle a pour exact corollaire une pauvreté tout aussi extrême. Combien de dizaines, de centaines de milliers de miséreux jetés sur le pavé pour financer un yacht, un jet privé, une partouze à Dubaï ? Combien de travailleurs pauvres, de chômeurs, de SDF pour un Bernard Arnault ou un Bolloré un Zoubarev ou un Doubinski ? L’incommensurable richesse de quelques-uns n’existe que grâce à la pauvreté du plus grand nombre et Christophe nous le rappelle brutalement.


J’ai lu ici ou là que l’on comparait Mertvecgorod aux Rougon-Macquart. La comparaison est sans doute un peu osée. Quoique. Si Zola explorait la vie sociale de la France sous le second empire, Christophe se livre à peu de choses près au même exercice avec sa république post soviétique à laquelle notre monde ressemble chaque jour davantage. Et finalement, c’est bien de nous-même qu’il nous parle, de notre présent pas forcément très rose et de notre futur assurément bien gris. Il place juste le curseur un cran plus haut, avec davantage de violence, de corruption, de misère que ce que l’on connait déjà. Mertvecgorod, c’est le miroir légèrement déformé de nos démocraties occidentales.


Au Diavble Vauvert - 2025

LES FORCEURS DE BLOCUS - JULES VERNE

Etranglés par les troupes de l'union, les États confédérés sont prêts à vendre à vil prix leurs stocks de coton en échange d'armes et de munitions. Le jeune et fougueux James Playfair parvient à convaincre son oncle, un riche négociant de Glasgow, de l'intérêt de commercer avec eux et obtient ainsi le commandement d'un steamer. Accompagné d'un équipage expérimenté le voici donc fermement décidé à faire fortune en déjouant la surveillance des navires nordistes. Mais deux passagers de dernière minute vont venir lui compliquer la tâche...

« Les forceurs de blocus » est une novella assez méconnue dont on se demande si elle a réellement sa place parmi les "voyages extraordinaires". On n'y rencontre pas de savant visionnaire ni de maître du monde, pas d'invention révolutionnaire, pas de contrées sauvages ou de terres inexplorées. En fait, n'était son intrigue au demeurant bien mince, cette petite centaine de pages tiendrait presque davantage du reportage que du roman puisqu'il y est surtout question de l'un des épisodes clé de la guerre de sécession : le siège de Charleston. 

Jules Verne a montré plus d'une fois son intérêt pour ce conflit qui ensanglanta les États-Unis. Il y fit allusion à plusieurs reprises (L'île mystérieuse) et lui consacra même un roman au titre on ne peut plus explicite : "Nord contre Sud". Ici, il joue quasiment les journalistes en nous exposant de quelle manière les troupes de l'union firent le blocus de la ville de Charleston. Sa relation s'avère d'ailleurs très précise et riche de toutes sortes de détails (le nom des forts, l'emplacement des batteries de canons) et nous rappelle que Jules Verne était contemporain des faits.

Ceci étant dit, il faut bien admettre que ce roman est tout à fait mineur dans l'œuvre de l'auteur. Ainsi que je l'ai déjà dit, l'intrigue y est ramenée à sa plus simple expression : un allez-retour Glagow/Charleston émaillée de quelques combats et poursuites navales et d'une évasion à peine décrite. Le tout est romanesque à souhait (ah la courageuse enfant partie sauver son pauvre papa, oh le brave capitaine prêt à risquer sa vie pour les beaux yeux de sa dulcinée !) et comporte quelques traces d'humour dues aux facéties de Crockston et au sens du commerce de Vincent Playfair ! Alors, pour la petite heure de lecture qu'il vous en coûtera, laissez-vous tout de même tenter !

Glénat - Marginalia - 1978

PETIT-LOUIS - EUGENE DABIT

De nos jours, Eugène Dabit est à peu près inconnu. Il est pourtant l’auteur d’un roman dont l’adaptation cinématographique par Marcel Carné est encore dans les mémoires ne serait-ce que pour la prestation d’Arletty et sa gueule d’atmosphère. Ce roman c’est « Hôtel du nord », son premier livre édité. « Petit-Louis » est le second. Si les deux mettent en scène le petit peuple de Paris, ouvriers, concierges mal embouchées, femmes entretenues, employés de tout poil et de tous états, « Petit-Louis » est avant tout un roman d’apprentissage. Mais un roman d'apprentissage un peu particulier puisqu'il se déroule pendant la première guerre mondiale. 

Nous suivons donc le jeune Louis âgé de 15 ans au début du roman, dans sa découverte des choses de la vie : travail, amitié, amour... Une initiation forcément biaisée par les évènements. Ses débuts dans le monde du travail se feront ainsi dans une entreprise vidée de tous les hommes en âge de se battre, ses premiers vrais amis seront ses compagnons de régiment et il découvrira les choses de l’amour dans un bordel de campagne. Il n'en aura pas moins l'occasion de se faire une idée assez juste du monde et de la société. Il s'éveillera à l’art et à la spiritualité, éprouvera ses premiers émois sentimentaux dans les bras d'une jolie prostituée et prendra conscience que, jusque dans les tranchées, les classes sociales et les différences de traitement qu'elles induisent continuent d'exister. La guerre bouleverse beaucoup de choses mais les inégalités demeurent. 

Si la question sociale semble importante pour Eugene Dabit, il ne se livre en revanche à aucune véritable attaque contre la guerre et ses conséquences. On sent bien dans son propos qu’il n’est pas de ceux qui exalte les vertus guerrières, mais on ne trouvera dans son roman aucune critique directe des politiques ou des militaires. Il nous fait juste entrevoir les horreurs de la guerre et les vies brisées, rien de plus : « Je lave doucement son visage, sa poitrine, ses bras qui sont d’affreux moignons. J’enveloppe son corps dans ma toile de tente et je me détourne pour ne plus voir cette chose raide, inhumaine, qui fut sensible, qui fut belle ».

Même s'il n'est pas présenté comme tel, "Petit-Louis" est un roman autobiographique ou du moins fortement inspiré de l’expérience de l'auteur. Cela explique peut-être son côté journal intime, avec ses menus faits et ses impressions jetés sur le papier, sans trop s'occuper de style. Cela donne un témoignage de première main sur la vie pendant la guerre, à Paris, en province, à l’arrière et pas seulement sur la ligne de front.

Gallimard - L'imaginaire - 1988

LES BANNIERES DE PERSH - ALAIN PARIS & JEAN-PIERRE FONTANA

Jack la poudre est un prospecteur qui parcoure l’espace en tous sens dans l’espoir de découvrir un bon filon. Au cours de l'un de ses vo...