Curieux roman que ce « Train zéro » du russe Iouri Bouïda, à la fois critique glaçante du stalinisme et métaphore sur le sens de la vie. En 120 pages bien tassées, l’auteur nous dresse une peinture sordide et ultra réaliste du quotidien des employés du poste 9. Ouvriers, cheminots, télégraphistes, prostituées, travailleurs forcés contraints d’exécuter une tâche dont le sens et l’utilité leur échappe. Sans jamais poser de question sur la nature et le chargement de ce fameux train zéro qui passe, jour après jour, ils assurent l’entretien de leur portion de ligne quelques soient les conditions de travail ou la rigueur du climat, leurs aspirations ou leurs problèmes familiaux.
Un chemin de fer qui synthétise l'intransigeance et la rigueur d’un régime tout puissant mais qui peut aussi être regardé comme une ligne de vie où se déclinent les interrogations existentielles de tout un chacun : d’où vient-on, où va-t-on, a quoi sert-on ? Il y a ceux qui veulent savoir, qui souhaite trouver un sens à leur travail et, plus généralement, à leur existence. Il y a ceux qui se révoltent car ils ne supportent plus la monotonie d’un labeur abrutissant ni le carcan d’un système qui les broie. Et il y a tous les autres, les plus nombreux, qui acceptent et qui ferment les yeux, qui se laissent bercer par le roulis des essieux, le métro, boulot, dodo quotidien et la litanie des jours qui se ressemblent.
Gallimard - L'imaginaire - 2012

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