MARS BLANCHE - BRIAN ALDISS

Touchée par une grave crise économique, la Terre n'a plus les moyens d'affréter des navettes vers ses colonies. Les habitants de Mars (quelques milliers de chercheurs, explorateurs, mineurs) se retrouvent donc isolés et contraints de se débrouiller seuls. Ils profiteront de cet isolement pour jeter les bases d’une société nouvelle et découvriront une étonnante forme de vie sur cette planète inhospitalière…

 Que ceux qui aime la SF avec ses vaisseaux spatiaux, ses combats galactiques et ses petits hommes verts passent leur chemin. Ici, il est surtout question de philosophie, d’ethnologie et de recherches scientifiques. Et c’est à la réalisation d’une société utopique où la place de l’homme est repensée que l’auteur nous convie. 


Brian Aldiss nous offre un roman dense, trop peut-être, et j’ai souvent eu l’impression qu’il fallait être titulaire d’un doctorat de physique pour comprendre toutes ses digressions scientifiquesMalgré tout, les idées échangées par tous ces intellectuels ne manquent pas d'intérêt et méritent que l'on s'accroche. A découvrir.


Métailié _ Bibliothèque Anglo-saxonne - 2001

LES PORTES DE L'EFFROI - LEWIS MALLORY

Après avoir été victime d'une agression ultra-violente, la vie de Martin Sorrel est bouleversée. Désormais possédé par l'esprit de Hans Klemperer, un jeune allemand tué en 1934, il doit lutter pour conserver sa propre personnalité tandis que les morts se succèdent parmi ses proches.

Voilà un roman qui dénote un peu dans la production habituelle de la collection gore. ici le sexe et la violence sont utilisés avec mesure et c'est à peine si on frémit à l'occasion des quelques meurtres qui parsèment le récit. L'auteur ne semble pas à l'aise avec le sordide et ses descriptions des scènes les plus dures sont soir expédiées (l'attaque de la soeur de Martin par des ours) soit métaphoriques (le couple de montagnards). Il est en revanche tout à fait à son affaire lorsqu'il s'agit d'orchestrer l'irruption du surnaturel dans l'existence de son héros et la déchéance psychique qui l'accompagne.

L'essentiel du roman nous parles donc de la manière dont Martin Sorel se voit contraint de lutter contre un double maléfique qui cherche à s'approprier son corps. Le sujet n'est pas neuf mais Lewis Mallory le traite correctement. Il décrit notamment très bien l'évolution psychologique de son personnage, entre déni et acceptation, combativité et résignation, tout en s'attardant sur les quiproquos que la coexistence d deux individualités similaires ne manque pas de provoquer parmi son entourage.

Je me pose néanmoins une question. Pourquoi avoir choisi comme dopplegänger, un membre des SA dans l'Allemagne des années trente ? Cela n'apporte strictement rien à l'intrigue même si les flashbacks qui nous montrent l'adhésion et l'ascension de Hans Klemperer parmi les SA sont plutôt bien tournés. En revanche, avec ce personnage de nazi homosexuel et sadique, à la fois victime et bourreau, Mallory tenait une très bonne idée. Il aurait pu s'en servir pour nous concocter un fort bon roman gore sur les méfaits des SA lors de la montée du nazisme au début des années trente ainsi que sur leur éradication par les SS.

Fleuve Noir - Gore - 1988


LE SANG DES ASTRES - NATHALIE & CHARLES HENNEBERG

Le conseil fédéral des civilisations galactiques est inquiet car des bouleversements astronomiques sans précédent ont été enregistrés à proximité de la planète Anti-sol. Les Elms, race terrestre constituée pour partie par les éléments primordiaux (eau, terre, feu) ont reconnu dans cette manifestation cosmique l'influence d’un Elm pur. Celui-ci s’est incarné sur Anti-sol sous la forme de la ravissante Esclarmonde. Or, composée essentiellement de l’élément feu, elle fait courir un risque immense à cette planète, copie conforme de la Terre à l’époque des croisades. Les Elms décident donc de lui opposer Conrad de Montferrat, un Elm de l’eau, afin d’éviter qu’Esclarmonde ne porte les passions à leur paroxysme.

Curieux roman qui s’apparente davantage au fantastique et à la fantasy qu’à la Science-Fiction. D'ailleurs, l’argument scientifique censé expliquer la relation entre le personnage incarné et son influence néfaste sur l’équilibre astral n’est pas franchement convaincant. J'ai peiné pour en suivre tous les développements et me suis passablement ennuyé. Il m’eut paru plus judicieux de n’évoquer que des motifs « merveilleux » qui eussent beaucoup mieux collés à ce « conte médiéval ». 

Néanmoins, l’auteur a trouvé là l’occasion de nous livrer une agréable vision de la Palestine féodale en proie aux luttes entre croisés et musulmans, et ce fut un plaisir que de se laisser emporter au rythme de sa jolie plume.

Le Masque Fantastique - 1976

LA PUISSANCE DU DESORDRE - PASCALE FONTENEAU

Avec un doctorat de physique en poche, Franck Tussier semble promis a un brillant avenir. Il est d'ailleurs rapidement engagé par une importante société pour laquelle il doit travailler à l'élaboration de nouveaux carburants. Mais l'ambiance dilettante qui règne dans son service le perturbe et lui semble un frein à ses ambitions. Aigri, il prend en grippe ses collègues et met sur pied une revanche qu'il veut éclatante...

Il y a près de 20 ans, Bret Easton Ellis remportait un franc succès avec son désormais célèbre American Psycho, roman choc mettant en scène un psychopathe de la pire espèce pourtant parfaitement intégré à la société américaine. Ce livre m'avait déçu. Trop long, trop répétitif, trop ennuyeux malgré la démonstration et le but recherché.


Sur un thème fort proche, le roman de Pascale Fonteneau est beaucoup plus réussi. Là encore, l'auteur nous fait pénétrer les pensées d'un psychopathe remarquablement intelligent. Excellent cursus universitaire, présentant bien, Franck Tussier pourrait être l'employé modèle. Mais en y regardant de plus près on décèle quelques fêlures dans sa personnalité, des marottes, des idées fixes et, surtout, un irrépressible besoin de dominer.

Pourtant, et c'est là tout l'intérêt du livre, si l'on sent bien que Franck dérape de plus en plus, on ne remet pas pour autant en question son équilibre mental. J'ai pour ma part longtemps cru qu'il agissait selon un plan savamment monté et qu'il voulait réellement se livrer à une petite expérience de sociologie. J'avais le sentiment d'être en présence d'un individu certes frustré, remonté contre la société, son entreprise et ses collègues, mais pas un dément capable des pires extrémités. Ainsi, ses « visites » des appartements de ses collègues me semblaient motivées par le désir d'en apprendre davantage sur eux et non par le besoin de se donner une illusion de puissance. 

Ce n'est que lorsqu'il met ses projets à exécution et surtout à la façon dont il s'y prend, que l'on découvre à qui l'on a affaire. Mais il faudra encore attendre la fin du roman pour prendre toute la mesure de sa névrose. On considère alors d'un œil nouveau tout ce qui précède et l'on comprend mieux la mécanique intime du psychopathe, la façon dont il se ment à lui-même et rejette la responsabilité de ses actes sur les autres.

Court et intense, ce roman palpitant se lit d'une traite et vous fera passer une agréable soirée.

Gallimard - Folio Policier - 1999

PIECES DETACHEES - CHRISTOPHER STORK

Au XXIème siècle, les techniques chirurgicales ont fait de tels progrès qu’il est désormais possible de se faire greffer à peu près n’importe quoi : reins, cœur, sexe et même un nouveau cerveau. Encore faut-il avoir de l’argent et, comme l’on peut sans douter, la société a tôt fait de se diviser entre ceux qui peuvent payer et conserver ainsi jeunesse et santé, et les autres contraints de se vendre « à la découpe ».

A vouloir courir trop de lièvres à la fois on prend le risque de n’en attraper aucun. Christopher Stork aurait dû faire sien cet adage et éviter de trop se disperser. Ce roman est en effet très confus et l’on finit par ne plus trop savoir quelle est en est la véritable intrigue : le vol de cerveau d’un génie, la lutte « boursière » de deux sociétés, l’enquête sur les origines de la fortune de l’un des personnages ou encore les déboires sentimentaux d’un autre.


Et pourtant, cette histoire de société où le commerce est roi et la vente d’organes banalisée était alléchante tout comme les premiers chapitres qui nous invitent à suivre le parcours d’un étudiant démuni et contraint de gager son corps en échange d’un prêt. Malheureusement l’auteur s’éparpille et même ses critiques (contre le capitalisme à outrance, les scientifiques dépourvus d’éthique, l’impunité du gouvernement…) sont trop nombreuses pour être convaincantes.


L’autre reproche que je ferais à ce livre concerne la complaisance avec laquelle il s’attarde sur les transsexuels et les changements de sexe pour finir par verser dans le grotesque avec ce couple dans lequel Madame est devenue Monsieur et vice versa !


Fleuve Noir Anticipation - 1984

LA GUERRE DES OCEANS - JOSE MOSELLI

Afin de se venger des Etats-Unis et du Royaume-Uni, le savant fou Fiodor Sarraskine se livre à un odieux chantage. Soit ces deux nations s’acquittent d’une fantastique rançon, soit il continue de couler leurs navires. Un témoignage laissant penser que le repaire du maître chanteur se situe dans les parages du Cap Horn, des navires de guerre sont dépêchés sur place. Un journaliste sans scrupules et un « noble cœur » seront également de l’affaire.

 De la SF de grand-papa, désuète à souhait et débutant à la façon d’une fiction romanesque avec un vilain criminel qui cherche à se venger, une jeune héritière en danger et un courageux officier prêt à tout pour la sauver. Le problème, c’est que l’auteur n’arrive pas à faire décoller l’action. Il y a pourtant de nombreux rebondissements, comme dans tout roman feuilleton qui se respecte, mais ça reste très convenu.


Les héros triomphent grâce à une chance insolente et les méchants, pourtant incroyablement puissants, sont battus à plate couture. Cela fini par irriter, puis par lasser, et les éléments de SF introduits dans le récit ne parviennent pas à relever le niveau. Des sous-marins révolutionnaires, une base secrète au fond d’une grotte et un savant acharné à détruire des navires de guerre, çà peut faire un grand roman quand on s’appelle Jules Verne, mais là, ça tombe à plat !


Marabout - Le Rayon Populaire - 1975

LE FOUILLEUR D'AMES - MICHEL HONAKER

Brian Shadley est un écrivain raté. Lâché par son éditeur, méprisé et trompé par sa femme, vivant dans un taudis, il aspire à des jours meilleurs. Il est partiellement exaucé le jour où l’espèce de bon génie qui réside dans la masure dont il vient d’hériter, s’attache à ses pas. Un génie qui n’a d’autre raison de vivre que de réaliser ses moindres désirs, formulés ou non. Mais doit-il vraiment s’en réjouir ? Est-ce vraiment une bénédiction que de voir s’accomplir toutes ses envies ? Même les plus intimes, les moins avouables et, peut-être, les plus dangereuses !

J’ai beaucoup aimé ce petit roman qui renouvelle de façon originale et diabolique le thème du bon génie. Ici, pas de lampe merveilleuse ou de bonne marraine, mais une entité qui a une façon bien à elle de rendre service et une nette prédilection pour les pensées les plus malsaines de son maître.


Sur la trame classique d’un roman d’horreur, Michel Honaker nous propose de découvrir non seulement les actes monstrueux commis par le démon Mash, mais aussi l’état d’esprit et les réflexions qui animent son héros. D’abord ravi de voir sa situation s’améliorer et ses ennemis ou rivaux punis, celui-ci finit par se rendre compte de la part de noirceur que recèle son âme et des terribles conséquences qui en découlent.


Au final, cela nous donne un roman gore mâtinée de psychologie, mélange peu commun mais plutôt réussi.


Fleuve Noir Anticipation - 1991

LA SAINTE FARCE - ROBERT SABATIER

Si je savais Robert Sabatier passionné de poésie, j’ignorais en revanche qu’il portait un intérêt presque égal au théâtre. Il n’est donc pas surprenant qu’il ait décidé de mettre en scènes celles et ceux qui le font vivre : acteurs, auteurs, producteurs, techniciens et autres petites mains du 6ème art.

« La Sainte farce » nous propose en effet de suivre la tournée haute en couleur d’une minuscule compagnie théâtrale dans la France des années soixante. Une France encore très rurale où la télé n’a pas encore tué le spectacle vivant et où l’arrivée de bateleurs constituait encore un événement. 


Le style de Robert Sabatier est peut-être un rien pompeux (un petit défaut qu’il gommera par la suite) et enlève sans doute un peu de spontanéité au récit des aventures de ses personnages. On ne s’en régale pas moins à partager la vie de cette dizaine de doux dingues sillonnant la France dans leur vieux bus, vivant d’expédients et de débrouille mais animés par un amour inébranlable pour leur art. 


C’est drôle, c’est émouvant et ça constitue un joli témoignage d’une époque et de mentalités désormais bien révolus.


Le Livre de Poche - 1987

DEPRESSION - FRANCOIS SARKEL

La pluie tombe sans discontinuer sur Durocor, petit bout de terre perdu au milieu d’immenses étendues d’eau. Dans cet univers borné et sans perspectives quelques personnages tentent de trouver une raison d’espérer encore : Jarine la prostituée au grand cœur prête à tout pour un avenir meilleur, son amie Vavette atteinte de la rouille ou encore Sarg le pêcheur de rats et Zam le pustuleux tous deux amoureux de la belle hétaïre…

 Le moins que l’on puisse dire c’est que François Sarkel ne fait pas dans la publicité mensongère et il faut faire preuve d’un bel optimisme pour ne pas chopper le bourdon à la lecture de ce bouquin. Tout y est triste à mourir, laid, gris et humide, sale et boueux. Les corps y sont couverts de champignons, de mycoses et de pustules et les esprits ne sont guère plus reluisants. Seuls motifs d’espérance : l’amour et la religion. Mais là encore, tout est détourné, dévoyé, avili. Côté atmosphère donc, l’objectif est sans conteste atteint avec cet univers d’une rare noirceur.


En revanche nous sommes moins bien lotis côté intrigue puisqu’il faut se contenter d’une petite énigme guère passionnante et accepter de n’avoir pas la réponse à certaines questions posées (l’origine de la rouille par exemple). Mais ce petit défaut est finalement sans importance tant le roman fourmille d’idées hallucinantes, un peu comme dans un Brussolo de la meilleure eau. Elles sont même tellement nombreuses que l’auteur ne peut les exploiter comme elles le mériteraient en raison du nombre de pages bien trop restreint en vigueur chez Fleuve Noir. C’est frustrant car bon nombre d’entre elles eussent mérité d’être développées. Je pense notamment aux églises concurrentes des « hydrolâtres » et des « Compagnons de l’arche » et aux terribles maladies que sont la rouille ou le syndrome de la sirène…


En tout cas François Sarkel nous offre une bien belle évocation d’un monde qui s’enlise (au propre comme au figuré) mais où les hommes s’acharnent à vivre encore et à faire perdurer inégalités et passions, amour et violence.


Fleuve Noir Anticipation - 1990

LES PORTES SANS RETOUR - GILLES THOMAS

Gyall Dara est pilote d'astronef et gagne sa vie en transportant du fret sur les planètes des confins. Sur Allègre, il rencontre Missie Oléone, fille d'un potentat local qui lui propose un engagement un peu particulier. Il s'agit de partir à la recherche de son frère jumeau, Axin, disparu après avoir emprunté l’une des « portes sans retour ». Risquant la prison sur Allègre à la suite d'une rixe, Gyall est contraint d’accepter son offre et c'est ensemble qu'ils tenteront d'élucider le mystère des dangereuses et énigmatiques portes.

 Gilles Thomas nous offre une fois encore un roman de SF qui se lit d’une traite grâce à une plume alerte et un indéniable sens de l'action. Pourtant, le thème du bouquin est fort simple, simpliste même. Il se résume à une succession de saynètes ayant pour cadre des univers aussi différents que dangereux et constituant pour nos héros autant d'épreuves dont il faut triompher.


Les personnages seront ainsi confrontés à un souterrain truffé de pièges, un Paris futuriste subissant un gouvernement fasciste, une société primitive adorant un dieu avide de sacrifices, des pirates de l’espace et joueront même un temps le rôle de curiosité zoologique.


La chute du livre n'est pas non plus franchement extraordinaire mais a le mérite de proposer une explication aux interrogations des héros (ainsi qu'aux nôtres !) ce qui n'est pas toujours le cas des livres du genre qui privilégient l'action plutôt que l'intrigue, la castagne plutôt que les solutions. Bref, un livre qui, s'il n'est pas le meilleur de l'auteur, constitue quand même un bon petit divertissement, un moment de pure détente où l'aventure et l'amitié indéfectible sont au rendez-vous. 


Mention spéciale pour la première page du roman que j’ai trouvée fort poétique.


Fleuve Noir Anticipation - 1994

LES CULBUTEURS DE L'ENFER - ROGER ZELAZNY

A l'issu des "Trois jours" pendant lesquels l'apocalypse nucléaire s'est déchaînée sur la planète, les États-Unis ont ...